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15 juin 2013Passionnant ! Voici un extrait d’un article publié en 2005 par le Time Magazine (On the Frontier of Search) : “Vous atterrissez tard dans la soirée dans une ville où vous ne connaissez personne.
Vous n’avez pas eu le temps de réserver un hôtel, votre bagage ne s’est pas présenté dans le carrousel et l’air conditionné de l’avion vous a donné un petit mal de gorge. Que faire ? Avec votre téléphone mobile, vous Googlez votre valise – elle est équipée d’une petite puce qui vous permet de la localiser – pour constater qu’elle a été déposée 200 mètres plus loin, au terminal suivant.
En allant la chercher, vous en profitez pour chercher une chambre d’hôtel. L’écran de votre téléphone vous montre des images de plusieurs hôtels dans votre gamme de prix, avec des vues depuis la fenêtre de votre chambre. Votre moteur de recherche vous donne la liste des pharmacies qui sont encore ouvertes à cette heure et vous annonce que votre groupe de blues favori jouera au festival de la ville durant le week-end.
Le moteur, qui peut chercher sur votre ordinateur resté à domicile, vous rappelle qu’un ami de collège vous a envoyé un mail il y a un an pour vous dire que lui et sa femme avaient déménagé dans cette ville (ce que vous aviez oublié). Vous décidez de les inviter au festival.” (traduction extraite d’Internet Actu : L’avenir de la recherche).
À l’époque, cet article m’avait paru complètement surréaliste, et les différents commentaires tournaient essentiellement autour de la confidentialité et de l’utilisation abusive des données personnelles. Huit ans plus tard, la situation a bien changé, car Facebook a réussi à nous faire admettre que la confidentialité est un truc de ringard (“We live in an open world“) et car Google a déjà livré la plupart des services décrits dans cet article (Google Now, le nouveau Google Maps, Google+…). En prenant un minimum de recul, on se rend compte que le pas franchit par Google en moins de dix ans est gigantesque, et qu’au cours des dix prochaines années ils vont nous livrer des services encore plus incroyables sur la base du Knowledge Graph ou des Glass
Si le Siri d’Apple avait fait beaucoup (trop ?) de bruit à sa sortie, je pense que nous ne mesurons pas bien le potentiel derrière Google Now. Le plus impressionnant avec cet assistant est sa capacité à anticiper vos besoins. Par exemple, il regarde dans votre agenda l’heure et le lieu de votre prochain RDV, calcul le temps de trajet en fonction des données en temps réel de la circulation ou de l’état des transports en commun, vous signale quand il est temps de partir et vous propose de notifier vos interlocuteurs par SMS de votre retard éventuel. Tout ceci est rendu possible grâce à la stratégie de diversification de Google dont les services concernent maintenant quasiment l’ensemble de nos activités quotidiennes :
- L’information avec l’actualité et la recherche (sur des domaines aussi variés que les aliments et les médicaments) ;
- Les informations locales et les déplacements avec Maps et Adresses ;
- Les divertissements avec YouTube et Play (musique, films, jeux, livres) ;
- Les achats avec Shopping et Wallet ;
- Les interactions sociales avec Plus et Hangouts ;
- Le travail avec Gmail, Agenda et Apps ;
- L’éducation avec Edu et YouTube EDU ;
- Les savoirs avec Knowledge Graph et Books ;
- Les données avec Public Data Explorer et Freebase…
Tous ces services étant bien évidemment liés par le biais d’Android et/ou Chrome. Le dernier domaine sur lequel Google n’a que peut d’emprise est la télévision, mais les choses pourraient changer avec les micro-consoles. Donc oui, effectivement, Google sait énormément de choses sur vous et votre quotidien : toutes vos données personnelles sont stockées, analysées, recoupées… dans le but de vous proposer des services à valeur ajoutée comme Google Now ou les très impressionnants Gmail Action Buttons : Take action right from the inbox.
Loin de moi l’idée de relancer le débat sur la confidentialité et les dérives potentielles de l’exploitation des données personnelles. Je pense ne pas me tromper en disant que notre économie et la société dans laquelle nous vivons reposent sur des systèmes d’information qui exploitent les données personnelles à très grande échelle, et ce depuis des décennies. Mais si vous ne voulez pas être fiché, débarrassez-vous de votre téléphone, de votre carte de crédit, de votre carte de transport, votre passeport… et adoptez le mode de vie d’après-guerre (la seconde guerre mondiale, pas la guerre du Golf).
Bref, le débat ne porte pas sur la confidentialité, mais plutôt sur notre dépendance à l’internet et à Google en particulier puisqu’il occupe une place centrale sur la toile. Signalons que les premiers écrits sur ce sujet remontent à 2008 (Is Google Making Us Stupid?) et que l’on nous ressort la question régulièrement (Does the Internet Make You Dumber? / Does the Internet Make You Smarter?) et à toutes les sauces (Les objets intelligents nous rendent-ils bêtes ?). Je ne me risquerais pas à vous livrer une analyse sur ce thème, simplement je pense que nous sommes autant dépendant de notre smartphone, que d’une calculatrice : nous pourrions nous débrouiller sans, mais c’est quand même nettement plus pratique avec. Ceci étant dit, je constate qu’il y a vingt ans je connaissais le N° de téléphone de mes amis par coeur, alors que je n’en connais plus aucun maintenant. Suis-je devenu plus stupide entre-temps ? Non pas pas réellement, car l’intelligence ne se mesure pas à la capacité de mémorisation ou à la rapidité de calcul (les ordinateurs seront toujours bien plus performants que nous dans ce domaine).
Donc non, notre dépendance à Google (ou par extension à l’internet) n’est pas forcément à craindre. D’une part, car nous sommes également dépendants au quotidien d’une infinité de choses que nous sommes incapables de produire nous-mêmes (pétrole, plastique, Nutella…). D’autre part, car l’intelligence de l’homme, celle qui en a fait l’espèce dominante de la planète, est plus liée à sa sensibilité (ses émotions), ses intuitions (déductions empiriques), sa capacité de discernement (sa conscience), sa créativité… Oui j’ai entendu parler de ce projet de drone qui peut prendre la décision de tirer tout seul sur ses cibles, mais ça relève plus de la science-fiction que de la réalité opérationnelle (je vous rappelle qu’un de nos soldats s’est fait récemment sanctionner pour avoir porté un foulard “non réglementaire”).
Nous en revenons donc à Google et à la place centrale qu’il occupe maintenant dans notre quotidien. J’ai eu l’occasion de lire ces derniers jours un certain nombre d’articles plus ou moins alarmistes (Welcome to Google Island, It’s Google’s world, and we’re just living in it, Google Glass in 10 years: The view from dystopia…), mais je reste confiant sur la capacité d’une société quôtée en bourse de se fixer ses propres limites. Certes, je ne vois pas de limite à l’ambition de Google, mais en tant qu’utilisateur j’aurais toujours la possibilité de me déconnecter, même si c’est une expérience… compliquée (I’m still here: back online after a year without the internet).
Oui j’ai volontairement confié une masse considérable de données personnelles à Google, dont les équipes les exploitent à des fins statistiques et comportementales. En contrepartie, ils me fournissent des services gratuits qui facilitent grandement mon quotidien. Cet arrangement tacite fonctionne plutôt bien et je n’ai pas l’intention de le dénoncer, car les bénéfices sont supérieurs aux désagréments. De plus, j’estime que les services et innovations que me propose Google (et par extension d’autres acteurs de l’internet) s’inscrivent dans une dynamique d’évolution sociétale : la société évolue et j’évolue avec elle grâce (en partie) aux nouvelles technologies. Ma vie serait-elle meilleure sans Google, Twitter, Amazon, mon smartphone, ma tablette… ? Difficile de répondre objectivement à cette question. Par contre, je serais très nettement en décalage avec mon entourage. J’imagine que Google n’occupe qu’une place très mineure dans le quotidien de moines tibétains, mais dans mon quotidien, c’est un incontournable.
Pour conclure, je vais répondre à la question posée dans le titre : oui, je pense que Google ambitionne de devenir notre système d’exploitation personnel, au même titre que Microsoft a dû l’ambitionner à sa grande époque ou qu’Alibaba ou Rakuten ambitionnent de le devenir sur leur marché. Tout est une question d’ambition, de moyens et de temps. Ils finiront par y arriver, j’en ai la certitude. Après ça, la grande question est de savoir qui fixe le rythme d’innovation / d’adoption : les entreprises privées ? Les institutions ? Les gouvernements ? Début de réponse chez Erwann Gaucher : Ces fétichistes du papier qui sont au pouvoir.
Thierry Barbaut